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SCHNELL Johann Jacob
à Paris (°1777)

1789

"On trouve dans le 3e numéro, une notice sur Jean-Jacques SCHNELL, inventeur de l’animo-corde (On devrait dire anemo-corde, du mot grec anemos, vent, et chorde, corde ; mais nous employons ce nom tel que nous le trouvons répété toutes les fois dans la Gazette de Musique). Il est né en 1740, à Vaihingen sur l’Enz, dans le duché de Würtemberg ; son père le destina à être menuisier ; après son apprentissage, il se mit en condition en 1760, chez le facteur d’orgues Gessinger, à Rothenbourg sur-le-Tauber ; depuis cette époque, il se livra avec le plus grand zèle à cet art, et finit de se perfectionner chez Van Dilken [DULCKEN], en Hollande, avec lequel il resta six ans.

En 1777, il vint à Paris et s’y établit. [Son établissement devint bientôt considérable; les clavecins sortis de ses ateliers eurent du succès, et il put à peine suffire aux demandes des amateurs. Il obtint enfin le droit de bourgeoisie, et un brevet de facteur de son altesse le comte d'Artois].

En peu de temps, il se vit en état d’occuper huit compagnons, et la bonté de ses instruments lui valut le titre de facteur d’instruments de la comtesse d’Artois ; enfin une harpe suspendue en plein air, lui donna la première idée de faire un instrument avec des cordes de métal, dont l’intonation ne serait produite que par la pneumatique (Une personne qui a connu SCHNELL particulièrement, nous a assuré que la première idée de l’animo-corde est plutôt due à un nommé Thscherschky, et que SCHNELL s’occupa ensuite de l’exécution de cette idée.

Au commencement, il y avait même sur l’instrument l’inscription Thscherschky et SCHNELL Fecere. Il est fâcheux que pendant que ce dernier, avec tous ses compagnons, étaient uniquement occupés de l’exécution de l’animo-corde, ce qui entraînait nécessairement beaucoup de dépenses et d’essais infructueux, il négligeait absolument son état, celui de faire des forte-piano). Après quatre ans d’essais et de travail, il parvint enfin, en 1789, à faire un animo-corde aussi parfait qu’il est aujourd’hui.

[Un document des archives de l'Ambassade de Suède à Paris nous apprend que Jean-Jacques Schnell, originaire du Würtemberg (mais les actes indiquent ici Faschingen, introuvable aujourd'hui, et non pas Vaihingen comme dans d'autres documents) avait pour épouse Euphrasie Dorothée Elisabeth Kreub et qu'ensemble, ils eurent au moins deux enfants, Jean-Michel né le 23 juillet 1783, et Jeanne Françoise Rosalie née le 25 août 1786.]

L’auteur de la notice y a joint un dessin exact de cet instrument. Ce qui le caractérise surtout, c’est qu’il convient principalement à des airs doux, et qu’il est préférable à tous les autres instruments pour accompagner la voix.

C’est un défaut essentiel de cet instrument que, lorsqu’on commence à y jouer, le vent produit, sur les cordes, un sifflement très désagréable, qui ressemble à celui qu’on fait en sifflant au moyen d’une clef creuse.

Ce sifflement se perd insensiblement pour ceux qui en sont à une certaine distance, à mesure qu’on continue de jouer ; mais lorsqu’on est près de l’instrument, on l’entend continuellement.

L’animo-corde ne peut servir que pour jouer des adagio, jamais des allegro. L’instrument est disposé de manière à faire croire que la musique est dans l’éloignement, et qu’elle approche insensiblement.

L’affluence pour voir et entendre l’animo-corde était prodigieuse [SCHNELL fit voir son animo-corde au Palais-Royal pour de l’argent, et son ami EDELMANN en jouait.]. Le C. Beaumarchais, qui s’était proposé de ne s’y arrêter qu’une demi-heure, y resta quatre heures, au bout desquelles il ressemblait à un homme qui sort d’un rêve, et ce n’est qu’alors qu’il s’aperçut qu’il avait manqué l’heure de son dîner. Les commissaires de l’académie des sciences et de celles des beaux-arts en rendirent les témoignages les plus honorables.

Enfin la ci-devant reine fit proposer à l’artiste de garder cet instrument pour elle, en lui promettant 100,000 francs pour l’instrument et 50,000 francs de gratification ; dès que sa situation lui permettrait de s’acquitter de cet engagement.

Cependant la marche que la révolution avait prise, ne lui donnait guère d’espoir de voir réaliser ces promesses. A cette époque se présenta un lord, qui fit à l’inventeur de l’animo-corde la promesse brillante de la faire passer à ses frais à Londres avec son instrument, de lui laisser la liberté de le faire voir et entendre dans cette capitale pendant un mois ; il lui garantir, pas semaine, une recette de 10000 guinées, qu’il complèterait de sa propre bourse toutes les fois qu’elle ne monterait pas à cette somme ; enfin SCHNELL devait lui céder alors son instrument pour 18,000 francs.

Il  balança d’abord : mais sa parole donnée, et les insinuations et les promesses de plusieurs personnes distinguées, le déterminèrent à refuser les promesses brillantes du lord. Celui-ci retourna dans sa patrie, et, trois jours après, la famille royale se sauva à Varennes.

Toutes les espérances de SCHNELL étaient alors évanouies, ses compagnons le quittèrent, et son établissement allait dépérir. Le titre de facteur d’instruments de la cour fut une raison suffisante pour le faire enfermer à la conciergerie ; et ce ne fut que la fermeté de son épouse qui le sauva de l’échafaud. Enfin, sous le prétexte de vendre son animo-corde à Bâle, et de faire, avec la somme qu’il en aurait, un commerce d’acier et de cuivre qu’il ferait passer de l’Allemagne en France, il obtint un passe-port, et arriva à Louisbourg [Ludwigsburg] dans l’hiver de 1795. 

C’est là qu’il s’occupe à faire des forte-piano, qui se distinguent autant par leur élégance que par leur durée, et l’égalité de leur son. Quant à l’animo-corde, iles encore à vendre à raison de 60000 florins ou 13,0000 fr. environ." A.L. Millin, « Mélanges » in Magasin encyclopédique ou Journal des Sciences, des Lettres et des Arts 5ème année, Tome 1er, 1799 (année VII), p. 515-519 (gallica.bnf.fr), chez Fuchs, Librairie, rue des Mathurins, maison de Cluny, n° 334     - et dans Allgemeine Musikalische Zeitung' d'octobre 1798, p. 40-44

1836

"[...] En 1796, il arriva à Ludwigsbourg, où il se fixa comme facteur de pianos, en recommençant, seul et modestement, une carrière qu'il avait parcourue avec un éclatant succès. La petite ville ne pouvait lui offrir que peu de ressources. Espérant améliorer sa position par la vente de l'anémocorde, il entreprit un voyage et arriva, en 1799, à Vienne en Autriche, où son instrument trouva beaucoup d'admirateurs, mais point de chalands.

Je ne sais, s'il retourna chez lui, ou s'il se fixa dans la capitale de l'Autriche. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'en 1811, au mois d'avril, son anémocorde y paraît de nouveau dans un grand concert que SCHNELL donna à cet effet. Cette fois, ce fut le célèbre Hummel qui en toucha et qui, par une admirable improvisation, fit valoir toutes les ressources de l'instrument. Depuis lors, plus de nouvelles ni de l'anémocorde, ni de son inventeur. Si maintenant on voulait connaître la construction de l'instrument, je n'oserais promettre de satisfaire complètement la curiosité du lecteur.

Les détails du mécanisme intérieur n'ont pas été rendus publics. L'inventeur, tout en montrant son instrument, en garda soigneusement le seçret. Ce qu'on en a su, le voici : Il y avait trois cordes pour chaque touche du clavier, et l'étendue de ce dernier était de cinq octaves. Le vent, fourni par deux soufflets, se distribuait dans des tubes métalliques, dont l'extrémité aboutissait aux cordes. Des soupapes d'une construction particulière s'ouvraient lorsqu'on pressait les touches; et alors, le vent poussé vers les cordes, mettait celles-ci en vibration. Il y avait en outre, quatre registres placés au-dessous du clavier, pour modifier la force du vent, et pour produire le crescendo et decrescendo, que l'on dit avoir été d'un effet surprenant. Quant à la construction de tout ce mécanisme intérieur, les détails en sont restés complètement inconnus.

A l'extérieur l'anémocorde présentait un carré long, delà profondeur de 7 pieds sur une largeur de 5, et une hauteur de 4 et demi. L'instrument était d'un poids considérable, à cause du métal qui était entré dans la construction. Selon le dire de SCHNELL, il contenait plus de 300 livres de laiton, employé à la confection des tubes, dont il a été question plus haut. Les personnes qui ont entendu l'instrument de SCHNELL, s'accordent à lui reconnaître une rare suavité de son. [...]" Revue et gazette musicale de Paris, Volume 3, 1836, p. 113-115

1856

"Joh. Jacob Schnell, 1740 zu Vaihingen im Würtembergischen geboren, versuchte 1785 das Piano mittelst Wind zu intoniren. Schnell hatte das Schreinerhandwerk erlernt, und kam 1762 zu dem Orgelbauer Geisinger in Rothenburg a. d. Tauber in Arbeit, bei dem er sich bald auf den Instrumentenbau verlegte. Nachdem er bei mehreren Meistern gearbeitet hatte, kam er zu van Oilken in Holland, wo er 6 Jahre blieb.

Dann ging er nach Paris (1777), wurde daselbst Bürger und Meister, erlangte den Titel als königlicher Hofinstrumentenmacher der Gräfin von Artois, und baute Flügel und Claviere. Vier Jahre arbeitete er unausgesetzt mit acht Arbeitern an dem Anemochord, wie er es nannte, dessen Saiten durch Windstrom in Fibration gebracht wurden. Dieses merkwürdige Instrument hatte eine Länge von 7' und eine Höhe von 4 ½. Der Körper war aussen ganz von Mahagonyholz gearbeitet.

Es hatte zwei Tastaturen übereinander. Die obere war von Ebenholz, die untere von Elfenbein. Die lntonirung geschah mittelst Tastendruck und Wind, welcher durch zwei im Innern des Körpers angebrachte Blasebälge erzeugt, und durch Messingröhren gegen die Saiten geführt wurde. Eigens angebrachte Fufstritte bewirkten, dafs die Ventile, welche sich beim Tastenniederdruck gewöhnlich ganz öffneten, auch halb bedeckt bleiben konnten, um den Ton abzuschwellen.

Diese Operation wurde noch durch besondere Registerzüge unter der Claviatur unterstützt. Der Saitenbezug war durchaus dreihörig, und die Saiten der drei oberen Octaven waren mit Seide übersponnen. Der Ton soll äusserst schmelzend und angenehm gewesen sein, und das stärkste An- und Abschwellen zugelassen haben.

Es eignete sich natürlich nur zum gebundenen langsamen Vortrag und zur Gesangbegleitung. Ueberall wo Schnell sein Anemochord producirte, erregte es Bewunderung und erwarb ihm die besten Zeugnisse.

Die stolze Königin Maria Antonette, welche sich oft an Schnell's herrlichem Spiel auf dem Anemochord ergötzt hatte, wollte es käuflich an sich bringen, und versprach ihm eine Gratification von 50,000 Livres und einen Preis von 100,000 Livres für dasselbe.

Ihre Chatoullen waren aber in Folge ihres ungeheuren Aufwandes, Sommerschlittenfahrt auf Salz! — u. dgl. so leer, dass sie nicht zahlen konnte. Schnell sollte ihr daher das Instrument bis auf bessere Zeiten aufheben.

Ein Engländer, welcher sich als Käufer meldete, versprach Schnell mit seinem Instrument frei nach London zu bringen, woselbst er es vier Wochen lang für Geld sehen lassen sollte.

Als Erlös verbürgte ihm derselbe wöchentlich 1000 Guineen, und wollte das allenfalls fehlende aus seiner Tasche stets zulegen. Nach Ablauf dieser vier Wochen müsse Schnell es ihm dann für den Preis von 1800 Livres überlassen. Der ehrliche Meister zog aber vor, der Königin sein Versprechen zu halten, und es demzufolge für dieselbe aufzubewahren.

Durch die Revolution ihusste Schnell endlich seine Gehülfen entlassen, und weil er Hofinstrumentenmacher war, hätte er sogar beinahe auf der Guillotine endigen müssen.

Die Entschiedenheit seiner Frau rettete ihn gerade noch zur rechten Zeit, wo der Augenblick nahte, in dem man ihn zur Schlachtbank führen wollte. Schnell flüchtete, und kam 1795 glücklich in Ludwigsburg mit seinem Auemochord an. Hier baute er nun wieder Flügel und Claviere nach Steinischer Manier von 150 bis 300 fl. Das Anemochord, Melches Schnell 1799 auch in Wien sehen liess, soll er endlich doch noch an einen Engländer nach London verkauft haben." Der Flügel oder die Beschaffenheit des Piano‛s in allen Formen, 1856, p. 113-114

1878

"Schnell, Johann Jacob, Instrumentenmacher, geboren 1740) zu Vaihingen in Würtemberg, arbeitete sechs Jahre in Holland und liess sich dann 1777 in Paris nieder, wo er ein Instrument (Aaemocorde) erfand, bei welchem durch Anschlagen der Tasten sich Ventile öffneten, vernittelst welcher durch Luftströmung die Saiten erklangen. Der Physiker Robertson nahm dies Instrument 1803 mit nach London." Musikalisches Conversations-Lexikon, 1878, p. 145

Pour les références voyez la page
Pianos français 1700 - 1799


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